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       Joseph-Guy Ropartz, compositeur du début du 20e siècle que j'ai abondamment évoqué sur ce blog, a composé cinq symphonies qui ont toutes fait l'objet d'un enregistrement microsillon par Michel Plasson et l'orchestre de Toulouse dans les années qui ont suivi son premier centenaire (1970-80), mais dont les quatre plus courtes seulement (la première et la quatrième, puis la seconde et la cinquième) ont été reprises par Sebastian Lang-Lessing et l'Orchestre Symphonique et Lyrique de Nancy dans les années 2000 (voir ici). En effet la troisième, la plus ambitieuse parce qu'elle compte des chœurs et dure près d'une heure est restée en attente, avec le seul enregistrement de Plasson maintenant épuisé.
     

       Aujourd'hui je vois qu'elle a été mise en ligne intégralement (ce qui est énorme !) sur Youtube avec l'enregistrement existant, mais d'une excellente qualité sonore et avec une bien jolie illustration vidéo. (Note de 2017 : cette vidéo est maintenant supprimée)

       Je ne résiste pas au plaisir de vous en faire découvrir les différentes parties, qui sont toutes inaugurées par un texte écrit par Guy Ropartz lui-même : aujourd'hui le premier mouvement, « très lent », puis « assez animé ».   

        Voici les paroles chantées au début. Elles préparent à une longue méditation sur la vie et l'amour, qui suivra dans les deux mouvements ultérieurs.

        Il faut savoir que Guy Ropartz, né dans les Côtes d'Armor, était un amoureux de la mer et aussi un poète.

     
    Voir l'enregistrement sur deezer ici.
    (nouvel enregistrement paru en octobre 2011 par Jean-Yves Ossonce
    avec les choeurs et l'orchestre de la Région Centre - voir ici)

     

        La nuit s'achève... Les étoiles, l'une après l'autre se perdent dans l'aube naissante... Des brumes flottent, puis s'effacent...

        Et sur la Mer, et sur la Plaine, et sur la Forêt, le ciel s'éclaire, le Soleil paraît et son éclatante lumière embrase la nature en joie.

     

       À suivre ici.

     


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  •    Écoutons aujourd'hui le second mouvement de cette Troisième symphonie de Guy Ropartz, dont je vous ai proposé hier le début.

        Je vais en profiter pour développer quelques commentaires : Ropartz (Joseph-Guy-Marie, qui signa "Joseph" pour sa poésie et "Guy" pour sa musique), né à Guingamp dans les Côtes d'Armor, nourrissait un amour profond et pour la mer qu'il aimait à contempler depuis Bréhec, petit port auprès duquel il possédait une résidence, et pour la forêt si présente en Bretagne - tout particulièrement les Bois d'Avaugour au sud-est de Guingamp. 

        C'est la contemplation du grand large et les longues marches dans la nature qui nourrirent très tôt son mysticisme de poète et de profond humaniste.

    Jguy_ropartz.jpg

        Guy Ropartz alors qu'il dirigeait le Conservatoire de Nancy (entre 1894 et 1919)

        Elève de César Franck et grand ami de Vincent d'Indy, il écrit cette symphonie en 1905, à l'aube du XXe siècle, dans un style parnassien encore proche parfois du Wagner de Parsifal. C'est ce qui explique qu'on l'oublia vite pour privilégier l'intérêt porté à de nouvelles générations de musiciens plus résolument modernes et surtout, moins contemplatifs. 

        Cependant sa personnalité est bien marquée, à la fois sereine et équilibrée, rayonnante et solide, puissante et vigoureuse. Les mouvements, très libres, se succèdent dans une progression originale puisqu'ils démarrent tous de façon lente et solennelle pour s'achever de façon plus animée. On ne peut éviter de se rappeler à cet égard les Béatitudes de César Franck, oratorio sur un sujet de l'Évangile, dont chaque mouvement est construit de façon similaire, commençant (à l'inverse des pages de Ropartz) par un passage tendu et se terminant de façon contemplative.

           

     Écoutez ici l'enregistrement sur deezer

     

    Voici maintenant le texte - beaucoup plus long - de cette seconde partie.     

        Nature, nature, que t'importe, en ta joie, la détresse des cœurs humains ?

        O Mer calme, tes calmes flots, pareils à des moires changeantes frôlent les grèves mollement de leur caresse insoucieuse... Et pourtant les frêles vaisseaux, bercés par tes vagues tranquilles, sont porteurs de détresse humaine !

        O Plaine, sous les brises tièdes, tu frissonnes de volupté dans ta chevelure d'épis qu'alourdit le grain déjà mûr... Et pourtant les larmes des hommes, aux heures du labour pénible, ont fécondé ton sol aride !...

        O Forêt, ton âme joyeuse joyeusement palpite et chante dans les feuillages qui bruissent et dans la chanson des oiseaux... Et pourtant l'ombre de tes chênes s'étendit sur les vains autels où l'homme implorait des Dieux sourds !

         Soleil, tu resplendis !... Mais ta lumière est impuissante à percer la nuit de nos coeurs ! Qui donc nous dira la raison de vivre !... Souffrir !... en nos corps, en nos coeurs !... Pourquoi ?

         L'homme foule aux pieds l'homme ; d'incessants combats nous épuisent. Opprimés sous les lois qu'imposent les plus forts, asservis par des rois, écrasés par des maîtres, nous pleurons, nul ne nous console ; nous crions, nul ne nous écoute ; et nos yeux sont las de regarder au ciel, dans l'attente vaine et le vain espoir qu'un Dieu se montre enfin.

    (Texte de Guy Ropartz)

      

     Troisième mouvement ici.

     

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  • Suite de cet article.
    Début ici.


        Au moment de vous confier le troisième et splendide dernier volet de cette symphonie - le plus long, mais l'aboutissement de tout l'ensemble - je ne saurais que vous inviter à visiter les autres enregistrements
    de Ropartz proposés par Youtube - à part peut-être la pièce pour trombone qui est un morceau d'examen.

     

    Ile-de-Brehat.jpgL'île de Bréhat


        À commencer par "la Chasse du Prince Arthur", poème symphonique sur un thème celtique 1 ; ou ce petit joyau de musique de chambre qu'est "Prélude, marine et chansons" pour flûte, harpe, violon, alto et violoncelle. Vous découvrirez aussi que Ropartz, fervent catholique et organiste aux messes de son pays, a composé plusieurs pièces pour orgue, par exemple cette "Sortie" aux rythmes syncopés et aux riches harmonies, ainsi qu'un recueil pour harmonium, 
    "Au pied de l'autel" - car l'église de Lanloup, sa paroisse bretonne, ne possédait pas d'orgue.

       Il s'est également illustré dans la mélodie et le répertoire pianistique, par exemple sur Youtube le magnifique 3e nocturne pour pianomerveilleusement impressionniste avec son rythme extraordinaire à 21/16 .

        Ajoutons à cela des œuvres chorales comme "Le Miracle de Saint-Nicolas" écrit en 1905 alors qu'il dirigeait le Conservatoire de Nancy, et un opéra : "Le Pays" (sur Youtube ici), inspiré par la vie des marins de Paimpol partis pêcher en Islande.

     

    cartes-postales-La-Croix-des-Veuves-Portz-Even   La "Croix des Veuves", érigée sur l'extrême pointe fermant la baie de Paimpol, où les femmes de marins allaient guetter les goélettes.

     

        Mais voici le texte de ce 3e volet :

     
    En écoute sur deezer ici
     

     

       Pauvres humains, cœurs misérables, votre mal est en vous.
      Chacun gémit sur sa propre détresse ; chacun se cherche en soi.
       Chacun s'aime soi-même et cet amour n'engendre que la haine.
       Aimez-vous les uns les autres, et vous pénétrerez la vie ; aimez-vous les uns les autres, c'est l'unique loi, c'est la toute science ; aimez-vous les uns les autres !

        Pour que votre souffrance vous soit plus douce, soulagez la souffrance des autres. Que votre labeur librement accepté s'efforce au bonheur de vos frères, il vous sera léger.
       Revêtez-vous d'Amour et de Justice, ouvrez votre âme à la bonté !
       Aimez-vous les uns les autres !

       Verbe divin, verbe consolateur ! La nuit où nous marchions s'éclaire ; le voile d'ombre se déchire, et voici qu'au soir de l'humanité une aurore nouvelle apparaît sur le monde !
       Aimons-nous les uns les autres ! La justice et la vérité, la paix et la bonté se partagent la terre.

        Aimons-nous les uns les autres ! L'humanité transformée monte vers la cité de joie et d'idéale liberté où les rois ne sont plus ni les maîtres, où l'unique loi d'amour a remplacé les lois désormais inutiles !

       Ô Nature, maintenant sois en fête ! Ô nature, mêle ta joie à la joie immense des hommes !

       Ô Mer calme, sur tes flots calmes balance les vaisseaux heureux qui portent l'allégresse humaine !

       Ô Plaine, offre au désir des hommes la splendeur de tes épis d'or qui s'alourdissent de grain mûr !

       Ô Forêt, que ton âme chante dans les feuillages qui bruissent et dans la chanson des oiseaux à la gloire des nouveaux autels !

       Et toi, Soleil, lève-toi radieux ! Unis ta lumière éclatante aux feux de l'idéal soleil de Vérité, de Justice et d'Amour !

    Texte de Guy Ropartz

     

    1 Note de 2017 : Elle n'y est plus, de même que la 3e Symphonie ; mais on trouve maintenant notamment sa "Messe à Sainte Anne" et son Requiem, ainsi que le psaume 136.

     

      

     

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    Girafes.jpg

     

        Ces girafes, rencontrées au zoo-parc de Beauval, n'ont pas de petits...

       Et pourtant, je ne résiste pas au plaisir de vous faire entendre le délicieux poème de Maurice Carême mis en musique par Francis Poulenc.

     

    LE CARAFON

     

    Pourquoi, se plaignait la carafe,
    N’aurais-je pas un carafon ?
    Au zoo madame la girafe
    N’a-t-elle pas un girafon ?
    Un sorcier qui passait par là
    À cheval sur un phonographe
    Enregistra la belle voix
    De soprano de la carafe
    Et la fit entendre à Merlin ;
    Fort bien ! dit celui-ci, fort bien !
    Il frappa trois fois dans les mains ;
    Et la dame de la maison
    Se demande encore pourquoi
    Elle trouva ce matin-là
    Un joli petit carafon
    Blotti tout contre la carafe,
    Ainsi qu’au zoo le girafon
    Pose son cou fragile et long
    Sur le flanc clair de la girafe...

     

       Écoutons cette mélodie extraite du recueil "La Courte-Paille", dans l'interprétation de David Lefort (ténor) et de Philippe Guilhon-Herbert (piano)

     
     
     
     

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  •     Je suis décidément séduite par les poèmes de Maurice Carême mis en musique par Francis Poulenc sous le titre de "La Courte-Paille"... Ceux ou celles d'entre vous qui auront peiné à endormir un bébé - sous son ciel-de-lit étoilé ! - seront émus comme je l'ai été par la magnifique interprétation que fait le compositeur de ce délicieux poème.

       Mais Poulenc (dont je vous invite vivement à visiter le site personnel mis en lien ci-dessus) avait lui-même une âme d'enfant, marquée d'une grande tendresse et d'une grande innocence, comme le soulignent son petit nez à la retroussette (la remarque est de moi) et son intérêt pour l'Histoire de Babar, de Jean de Brunhoff.

     

    Le-Sommeil.jpg

     

       Voici le texte de ce premier des sept poèmes composant le recueil :

     

    LE SOMMEIL

    schtroumphette-bebe-pleure.jpg


     

    Le sommeil est en voyage ;
    Mon Dieu, où est-il parti ?
    J’ai beau bercer mon petit,
    Il pleure dans son lit-cage,
    Il pleure depuis midi !

     

    Où le sommeil a-t-il mis
    Son sable et ses rêves sages ?
    J’ai beau bercer mon petit,
    Il se tourne tout en nage,
    Il sanglote dans son lit !

     

    Ah ! Reviens, reviens, sommeil,
    Sur ton beau cheval de course !
    Dans le ciel noir, la Grande Ourse
    A enterré le soleil
    Et rallumé ses abeilles.

     

    Si l’enfant ne dort pas bien
    Il ne dira pas bonjour ;
    Il ne dira rien demain
    À ses doigts, au lait, au pain
    Qui l’accueillent dans le jour !

    Maurice Carême

     


       Le Sommeil, mélodie extraite du recueil "La Courte-Paille" de Francis Poulenc, dans l'interprétation de David Lefort (ténor) et Philippe Guilhon-Herbert (piano) - CD Saphir Productions.

     

    Bebe-dodo.jpg

     

        Si ce cycle de mélodies vous séduit vous aussi, ainsi que la personnalité du compositeur, vous pouvez prolonger votre découverte à cette page, grâce à une vidéo au cours de laquelle Poulenc explique pourquoi il les a composées, et où il en interprète deux autres au piano avec sa soprano de prédilection Denise Duval. Cependant la prise de son ancienne ne permet pas de percevoir le texte aussi clairement qu'on le souhaiterait, aussi pouvez-vous également le suivre à cette page...

     

     

     

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