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         Avant-hier, je me suis rendue à Fontainebleau pour assister à un concert donné en mémoire de mon père par son successeur au lycée François Ier de cette ville.

     

    Annonce concert 16 mai 

     

            En effet, Jean-Jacques Prévost a pris la succession jusqu'en 2007 de mon père dans la section A3 musique qu'il avait créée aux tous débuts de son histoire (elle s'appelait alors A6). Et de même qu'Eric Lebrun, ancien élève de mon père, est venu lui rendre hommage en exécutant pour nous le Choral du Veilleur de Jean-Sébastien Bach aux grandes orgues de l'église  de Saint-Louis, de même Jean-Jacques Prévost, animateur d'une chorale remarquable (Laudate Dominum), a pu trouver parmi ses anciens élèves l'essentiel des musiciens qui constituent son orchestre dans cette majestueuse prestation, ainsi qu'au moins l'une des voix solistes.

     

    ConcertFBleau-160510-01

         Dans l'église comble, chacun a retenu son souffle de la première à la dernière seconde... Et ce n'est qu'après de nombreux rappels que nous pensâmes à prendre quelques photos durant l'exécution en bis du dernier verset du Credo :  

    « Et exspecto resurrectionem mortuorum, et vitam venturi saeculi - Amen »
    « Et j'attends la résurrection des morts, et la vie du monde à venir - Amen »

      

     

     

            Cette oeuvre magistrale d'une durée de deux heures est une des rares compositions du Maître de Leipzig sur un texte latin destiné à l'Eglise Catholique ; et si certains le trouvent plus convaincant dans ses cantates ou ses Passions, je trouve pour ma part beaucoup de points communs entre ces pages et celles du Magnificat, qui est sans nul doute l'un des chefs d'oeuvre du Kantor. Dans tout ce qui concerne la religion et la spiritualité, Bach conserve la même puissance incomparable.

     

    ConcertFBleau-160510-02La première photographie était prise en "haute définition" ; celle-ci est prise au flash... Comparez. Les deux peuvent être agrandies (ainsi que la dernière ci-dessous) et si vous agrandissez, celle-ci sera de meilleure qualité quoique l'autre reflète mieux la véritable luminosité du lieu. Ainsi vous pourrez apercevoir à droite du mollet droit du chef d'orchestre, sous le pupitre, le hautbois d'amour dont je vous parle plus bas. 

     

          Voici l'un de mes passages préférés, le premier verset du Sanctus, interprété ici par "The Sixteen" sous la direction de Harry Christophers. 

                

                

    « Sanctus, sanctus, sanctus, Dominus deus Sabaoth ! Pleni sunt caeli et terra gloria ejus »
    « Saint, saint, saint, le Seigneur, Dieu de l'Univers ! Le ciel et la terre sont remplis de sa gloire »

               Malgré une interprétation que je trouve un peu sèche, je vais réutiliser le deezer pour vous faire entendre un passage plus lent, afin que vous ayez une idée de la diversité de l'oeuvre. Malheureusement je ne possède la messe en si mineur qu'en deux cassettes audio, il m'est donc plus facile de puiser dans les ressources du net (d'ailleurs le passage du "sanctus" ci-dessus est à cause de cela en mono) ; vous en goûterez tout de même la recherche harmonique... Il s'agit d'un verset tiré du Credo, le "et incarnatus est ".
     
    « Et incarnatus est de Spiritu Sancto ex Maria Virgine, et homo factus est. »
    « Par l'Esprit-Saint, il a pris chair de la Vierge Marie, et s'est fait homme. »
     
     

         C'est aussi l'un de mes passages préférés.
        Et comme je ne puis tout de même ignorer les nombreux airs interprétés par les solistes, et à chaque fois accompagnés d'un instrument mis en valeur (la flûte, le violon, le cor même dans un air de basse), je ne résiste plus au plaisir de vous faire découvrir cet air pour alto (ou contre-ténor) dans lequel l'instrument concertant est le hautbois d'amour... Un instrument magnifique maintenant trop oublié, l'intermédiaire entre le hautbois classique et son "grand-frère" le cor anglais.

     

     

    Il s'agit d'un extrait du Gloria :

    « Qui sedes ad dextram Patris, miserere nobis »
    « Toi qui es assis à la droite du Père, prends pitié de nous »

     

    Pour terminer, le salut des solistes et du chef :

    ConcertFBleau-160510-03De gauche à droite : Emilie Rose Bry (soprano 1), Dominique Mc Cormick (soprano 2), Jean-Jacques Prévost (chef d'orchestre), Sophia Castiello (alto), Gil Chazallet (ténor), et Olivier Ayault (baryton).
     
     
     
     

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         Mon "petit" frère joue de la Musette de cour, instrument qu'il a entièrement réhabilité et ressuscité.

          Le voici en 1996 dans "la béquille du père Barnaba", XIIIe concerto comique de Michel Corette.

    (Jean-Christophe Maillard, musette baroque, orchestre baroque de Montauban dir. Jean-Marc Andrieu). 

     
       L'instrument originaire du XVIIe siècle est animé d'un soufflet situé sous le bras droit, ce qui évite l'utilisation d'un chalumeau, et a été progressivement recouvert de belles tapisseries évoquant les bergeries ; il était affectionné par la noblesse pour sa sonorité tendre et discrète et intervenait donc dans les spectacles de cour où l'on voyait des bergers. 

        En consultant Youtube, vous pourrez voir Jean-Christophe, plus âgé, dans un concerto de Vivaldi transcrit par le compositeur baroque Nicolas Chédeville et intitulé "Les Plaisirs de l'été".

     
     


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        Quand on dit "l'informagique", c'est au sens de sorcellerie !! 

     

    (L'Apprenti Sorcier de Paul Dukas)

     

         En effet voyez ce que me coûte d'avoir voulu alléger un peu le design de ce blog qui date de 2005... : démarré en V1 (la version 1 d'overblog) qui m'a donné énormément de fil à retordre car il fallait faire beaucoup par soi-même, j'ai dû passer à la V2... Où les changements étaient tels que l'on nous recommanda certains designs afin de ne pas détruire notre beau travail initial.

       Alors maintenant, téméraire que je suis qui ai voulu recommencer tout ça ! Il y a manifestement des lois dans le CSS qui font que mon blog n'a pas résisté à  la vague de fond.

        Et pourtant... Ma seule "faute" a été de vouloir réduire mes colonnes à deux au lieu de trois.

     

        Le plus ennuyeux est que j'avais oublié que les changements sont irréversibles et n'avais pas enregistré mon CSS. Lors du passage à la V2 on nous avait bien recommandé de le faire : je retrouve donc dans mes documents le CSS de V1... La belle affaire ! Et comme je n'ai pas le nouveau, eh bien impossible de restaurer la configuration précédente qui finalement n'était pas si mal. Me voici donc obligée d'aller de l'avant et de tout reconfigurer...

     
          Wait and see....

     

     

     

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         Un petit coucou avant le réveillon pour vous souhaiter à tous une belle soirée !

        reveillon.gif

          Et pour vous changer de la musique que vous allez entrendre ce soir, un petit "Tambourin" pour orgue et musette de Charles Buterne (1700-1750) enregistré récemment par mon "petit frère" Jean-Christophe (que vous voyez à gauche sur la photo).

     



    Musique-dOccitanie
     
      Cette photo, comme l'extrait musical ci-dessus, est tirée d'un disque qui vient de paraître chez Elegia records (marque italienne) et qui s'intitule "Musique d'Occitanie". A l'orgue vous entendez Silvano Rodi (photographié ci-dessus au centre) et c'est François Dujardin (je ne pense pas qu'il soit le frère de Jean !!) qui tient le fifre, le galoubet et le tambourin.

     
    nouvel_an_025-copie-1.gif
     
     

             Et voilà, on se quitte avec Jean-Sébastien Bach, et à bientôt en 2011 !!

     

     

    Grosses bises à tous !
     
     

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        Dans sa lettre d'information de Janvier, l'Education Musicale, cet excellent bimestriel consacré à l'enseignement de la musique dans les Lycées, Universités et Conservatoires rapporte un amusant pastiche écrit par Marcel Proust à l'intention de son ami musicien Reynaldo Hahn, de l'Opéra Pelléas et Mélisande de Debussy, ou plus particulièrement de son livret "symboliste" écrit par Maurice Maeterlinck.

     

    Melisande.jpg

    Mélisande lors de la création de l'Opéra en 1902

     

        Les connaisseurs riront d'emblée d'un humour qu'attire naturellement le style ampoulé et les allusions compliquées du grand poète Belge.

         Pour les profanes, j'expliquerai en quelques mots que ce drame met en scène une jeune fille d'apparence très naïve, Mélisande, trouvée errant dans un bois et comme amnésique par Golaud, un homme célibataire d'âge mûr et de petite noblesse bretonne. L'ayant épousée il l'abandonne souvent dans son triste château pour aller chasser, et c'est son jeune frère Pelléas, beaucoup plus doux, qui s'occupe de la jeune femme et bientôt s'en éprend. Malheureusement Golaud se montre très vite d'une jalousie maladive et épie leurs rencontres, voire les provoque. Malgré l'intervention effrayée du vieil Arkel, grand-père de Golaud et de Pelléas, Golaud finit par tuer son frère tandis que Mélisande, qui était enceinte, accouche prématurément et meurt des suites de ce traumatisme.

     

    pelleas_decor.jpg

    Esquisse du décor prévu pour la première de Pelléas

     

        J'ai essayé de déterminer les principaux passages dont Marcel Proust s'est inspiré pour le texte qui va suivre, et vous les livre avec la musique de Claude Debussy, qui est sublime.

         Dans le premier d'entre eux, Pelléas sort d'une visite très éprouvante des souterrains du château que lui a infligée Golaud. Symboliquement cela évoque les tréfonds de l'âme torturée de ce dernier. En voici le texte et la musique, dans l'interprétation d'Armin Jordan dirigeant l'orchestre national de Monte-Carlo, avec Eric Tappy dans le rôle de Pelléas (enregistrement Erato de 1979). 

     

        En voici le texte :

     

    Acte III- Scène 3 (début)

    Une terrasse au sortir des souterrains.

    Entrent Golaud et Pelléas.

     

    PELLÉAS

    Ah ! Je respire enfin !...

    J'ai cru, un instant, que j'allais

    me trouver mal dans ces énormes grottes ;

    j'ai été sur le point de tomber...

    Il y a là un air humide et

    lourd comme une rosée de plomb,

    et des ténèbres épaisses

    comme une pâte empoisonnée...

    Et maintenant, tout l'air de toute la mer !...

    Il y a un vent frais, voyez, frais comme une feuille qui vient de s'ouvrir, sur les petites lames vertes...

     

     

    (Musique de Claude Debussy)

     

     

          Dans le second, qui clôt le drame, Mélisande se meurt sous les yeux de Golaud éperdu de n'avoir jamais pu lui faire avouer de relations coupables avec le frère qu'il vient d'assassiner, ainsi que du médecin impuissant à la sauver, et du vieil Arkel plein de sagesse. C'est François Loup qui interprète le rôle du vieillard, tandis que Michel Brodard est le médecin et Philippe Huttenlocher Golaud. Le rideau tombe à la fin de cet extrait.

     

      (Musique de Claude Debussy)

     

    Acte V - Scène unique (fin)

     (La chambre est envahie peu à peu par les servantes du château qui se rangent en silence le long des murs et attendent)

     

    GOLAUD (se levant brusquement)

    Qu'y a-t-il ?

    Qu'est-ce que toutes ces femmes viennent faire ici ?

    LE MÉDECIN

    Ce sont les servantes...

    ARKEL

    Qui est-ce qui les a appelées ?

    LE MÉDECIN

    Ce n'est pas moi...

    GOLAUD

    Que venez-vous faire ici ?

    Personne ne vous a demandées...

    Que venez-vous faire ici ? Mais qu'est-ce que c'est donc !

    Répondez !...

    (Les servantes ne répondent pas)

     

    ARKEL

    Ne parlez pas trop fort...

    Elle va dormir ; elle a fermé les yeux...

    GOLAUD

    Ce n'est pas ?...

    LE MÉDECIN

    Non, non ; voyez, elle respire...

    ARKEL

    Ses yeux sont pleins de larmes. Maintenant c'est son âme qui pleure...

    Pourquoi étend-elle ainsi les bras ? Que veut-elle ?

    LE MÉDECIN

    C'est vers l'enfant sans doute. C'est la lutte de la mère contre...

    GOLAUD

    En ce moment ? En ce moment ? Il faut le dire, dites ! Dites !

    LE MÉDECIN

    Peut-être...

    GOLAUD

    Tout de suite ?...

    Oh ! Oh ! Il faut que je lui dise...

    Mélisande ! Mélisande !...

    Laissez-moi seul ! Laissez-moi seul avec elle !...

    ARKEL

    Non, non, n'approchez pas... Ne la troublez pas...

    Ne lui parlez plus...Vous ne savez pas ce que c'est que l'âme...

    GOLAUD

    Ce n'est pas ma faute, ce n'est pas ma faute !

    ARKEL

    Attention... Attention...

    Il faut parler à voix basse maintenant...

    Il ne faut plus l'inquiéter...

    L'âme humaine est très silencieuse...

    L'âme humaine aime à s'en aller seule...

    Elle souffre si timidement...

    Mais la tristesse, Golaud...

    Mais la tristesse de tout ce que l'on voit !...

    Oh ! Oh !

    (En ce moment, toutes les servantes tombent subitement à genoux au fond de la chambre)

     

    ARKEL (se retournant)

    Qu'y a-t-il ?

    LE MÉDECIN (s'approchant du lit et tâtant le corps)

    Elles ont raison...

    ARKEL

    Je n'ai rien vu. Êtes-vous sûr ?...

    LE MÉDECIN

    Oui, oui.

    ARKEL

    Je n'ai rien entendu... Si vite, si vite... Elle s'en va sans rien dire...

    GOLAUD (sanglotant)

    Oh ! Oh !

    ARKEL

    Ne restez pas ici, Golaud...

    Il lui faut le silence, maintenant...

    Venez, venez...

    C'est terrible, mais ce n'est pas votre faute...

    C'était un petit être si tranquille, si timide et si silencieux...

    C'était un pauvre petit être mystérieux,

    comme tout le monde...

    Elle est là, comme si elle était la grande sœur de son enfant...

    Venez. Il ne faut pas que l'enfant reste ici dans cette

    chambre...

    Il faut qu'il vive, maintenant, à sa place...

    C'est au tour de la pauvre petite...

      Maurice Maeterlinck

     

           Et maintenant, voyons ce qu'en fit Marcel Proust à l'intention de son ami Reynaldo Hahn, avec lequel probablement il avait coutume de se rendre parfois à l'Opéra.

         J'avoue qu'il picore à de nombreux autres passages (la découverte dans le bois de Mélisande qui déclare qu'elle "n'est pas d'ici", ou la quête désespérée de la bague perdue dans la fontaine et "qu'on ne retrouvera jamais"...), mais ceux que je vous ai cités sont particulièrement beaux et représentatifs.

     

    proust.jpg

    Marcel Proust

     

    « Je vous avais fait un joli petit pastiche de Pelléas... C'est Pelléas et Markel qui sortent de soirée et qui ne peuvent retrouver leur chapeau [il faut chanter en même temps] :

     

      Pelléas (dans l'antichambre) :

    - Il faisait là-dedans une atmosphère lourde et empoisonnée. J'ai cru plusieurs fois que j'allais me trouver mal. Et maintenant tout l'air de toute la terre ! (très doux) On dirait que ma tête commence à avoir froid pour toujours.

     Markel :

     - Vous avez, Pelléas, le visage grave et plein de larmes de ceux qui sont enrhumés pour longtemps. Ne cherchez plus ainsi. Nous ne le retrouverons pas. On ne retrouve jamais rien ici. Quelqu'un qui n'est pas d'ici l'aura emporté. Il est trop tard. Mais comment était-il ?

       Pelléas :

     - C'était un pauvre petit chapeau comme en porte tout le monde ! On n'aurait pu dire de chez qui il venait. Il avait l'air de venir du bout du monde.

       Markel :

     - Nous n'en retrouverons plus d'autre maintenant. C'est une chose terrible, Pelléas. Mais ce n'est pas notre faute.

       Pelléas :

     - Quel est ce bruit ?

      Markel :

     - Ce sont les voitures qui s'en vont.

       Pelléas :

     - Pourquoi s'en vont-elles ?

       Markel :

     - Nous les aurons effrayées. Elles auront su que nous nous en allions très loin. Elles ont eu peur et elles sont parties. Elles ne reviendront pas.

     

    Tu comprends, mon cher Binibuls, ils vont revenir sans chapeau et sans voiture. C'est embêtant. »

     

    Marcel Proust.

     

    Reynaldo_Hahn-_par_Lucie_Lambert_-1907-.jpg

    Reynaldo Hahn peint par Lucie Lambert (1907)

     

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