• Mon Voyage en Afrique noire - 8

     
    Fêtes
    (1ère partie : à Amaradougou)

    (petit rappel : nous sommes ici, en pleine brousse
    et ce voyage a été effectué en août 1975)


        Hé hé ! Avant les "fichus quarts d'heures", nous avons encore les "fêtes" à mentionner... Donc il faut bien le dire, avec quatre chapitres de "bons moments" et un seul de "fichus quarts d'heures", le résultat sera quand même très positif, n'est-ce pas ?

        À Amaradougou, village pauvre et musulman, peuplé de gens originaires du Mali qui avaient fui le Sahel, il n'y avait pas d'électricité, pas de transistors, encore moins de téléviseurs. Mais le samedi soir, il était de tradition qu'un musicien passe pour offrir à ceux qui le souhaitaient un petit concert. Par chance, nous fûmes invités, très cordialement, à y assister.
        Ce premier samedi, dès le matin, le musicien avait commencé à installer son instrument, et chacun put l'admirer, voire l'essayer... C'était un balafon ! Merveille de douceur aux sonorités mélodieuses et feutrées... Moi qui tombais de ma planète, je croyais que les "gamelangs" n'existaient qu'à Bali, et j'écarquillai les yeux devant ce petit bijou de percussion artisanale.


    Mon Voyage en Afrique noire - 8
    N'ayant pas moi-même pris de photos à Amaradougou, j'insère ici des photos issues
    d'autres sites ; sur cette image il s'agit plutôt d'une boutique de vente d'instruments,
    et les personnages photographiés avec sont plus européanisés que nos hôtes,
    qui portaient la robe malienne et le bonnet traditionnel sur la tête. 


        Le second samedi cependant, nous fûmes encore plus surpris. Appelés tard, alors que la nuit était tombée, aux cris de "concert ! concert !" (approximativement), nous découvrîmes un individu seul avec une  drôle de petite cithare à la main. Nous pensions presque qu'il l'avait inventée lui-même tant cette calebasse surmontée d'une tige de bois sur laquelle étaient tendues seulement trois cordes nous paraissait sommaire.
        Chacun l'écoutait religieusement tandis qu'il psalmodiait en s'accompagnant de notes répétées sur une gamme quasiment toujours identique. À nos questions, à l'aide de gestes et de monosyllabes, il nous dit que son instrument s'appelait "
    Koni" (c'est du moins ce que nous avons noté, pensant que cela signifiait "instrument") ; et qu'il racontait des scènes de guerre, ou de chasse. Stupéfaite, je découvrais le descendant d'Homère, l'aède qui de cité en cité va portant les hauts faits des héros ! Je n'en conçus que plus d'admiration pour ce peuple qui avait su garder pour nous la fraîcheur originelle d'une culture naissante, et qui possédait ses musiciens errants, comme Orphée.
        En fait, je découvre aujourd'hui, grâce à vous et à l'internet, que c'est un instrument connu du Mali, qui s'appelle précisément
    N'goni, et dont les interprètes, porteurs de la culture traditionnelle, sont appelés "griots".  En voici une représentation :

    Mon Voyage en Afrique noire - 8
    Mais vous trouverez plus de renseignements,
    dans une formule plus sophistiquée ici,
    ou d'autres représentations .


        Un jour, notre joie fut à son comble. On vint nous annoncer qu'une femme venait d'accoucher, et que pour fêter l'heureux évènement, il était de tradition que toutes les femmes du village viennent danser devant sa porte. Pouvions-nous y assister ? Bien sûr ! Le vieux Sékou Traoré était déjà assis sur un tronc aux premiers rangs de l'assistance, sa fillette près des genoux, et faisait signe à Robert de filmer sans se soucier de rien. Seules les femmes avaient le droit de danser, mais en même temps elles chantaient, elles psalmodiaient un air sans doute habituel pour la circonstance, au son du seul instrument possédé par le village, un tambour djembé, sur lequel tapait admirablement un garçon au visage radieux.
     

    Mon Voyage en Afrique noire - 8

    Bien sûr, cette photo rend très mal compte de ce que nous avons vécu,
    puisque d'abord c'était en plein jour, qu'ensuite il n'y avait qu'un
    percussionniste, avec un tambour plutôt coloré comme celui du premier plan,
    et qu'enfin personne n'avait de chaise ni de vêtements à l'européenne comme ici
    (le percussionniste était à genoux sur son tambour).     



        Les femmes entraient dans la danse plus ou moins à tour de rôle, au centre d'un cercle serré d'assistants généralement debout, qui tapaient dans leurs mains pour les accompagner, se balançant en avant avec les mains levées, et une joie évidente qui pour une fois nous les montraient sous un autre jour que épuisées par le travail.
        Enfin, le moment le plus réussi fut l'entrée en scène d'une femme devant laquelle toutes s'effacèrent (est-ce pour sa personne, ou pour ce qu'elle voulait exprimer ?) : elle s'était affublée d'un oreiller plaqué sur le ventre par-dessus lequel elle avait refermé sa robe et sa ceinture et, sautant lourdement sur les deux pieds avec les fesses en arrière, faisant des mimiques concentrées, elle me semblait mimer l'accouchement d'une femme... Elle fut abondamment applaudie et clôtura le spectacle...

    Mon Voyage en Afrique noire - 8
    Voici la seule photo que j'aie trouvée de danses de femmes en Afrique.
    Elle est petite, mais se rapproche cependant assez bien de ce que nous avons connu.
    Elles dansaient à plusieurs, mais s'effaçaient parfois pour admirer
    une plus douée que les autres.

     

        Je ne vis ni le bébé, ni la jeune accouchée, mais quel moment intense pour tous, et notamment pour moi qui commençais à me vanter alentours - malgré mon extraordinaire sveltesse due au régime ultra léger qui nous était appliqué - de l'heureux évènement dont je portais la promesse !...


     Anecdotes ajoutées au récit ici.
     
    Suite du voyage ici.
     
     
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  • Commentaires

    1
    Jeudi 29 Juin 2006 à 12:00
    Vraiment très bien le fait d'aller danser devant la porte d'une femme qui va accoucher, quelle belle façon d'accueillir un enfant ! Ce doit être vraiment sympa... Bisous
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