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Le temps n'existe pas
J'ai essayé de remonter dans ma mémoire au plus lointain souvenir possible. Bien sûr, pour cela on s'aide de ce que l'on sait de l'environnement dans lequel on se trouvait enfant...Et j'ai retrouvé cette vision d'une fenêtre éclairée par le jour malgré les rideaux tirés, et moi assise dans un lit et appelant pour ne pas y rester. Ensuite mon père venant me chercher et me disant de ne pas faire de bruit pour laisser maman dormir, et m'emmenant avec une couverture et mon oreiller pour me recoucher sur le canapé du séjour, d'où je le regardais avec curiosité travailler, travailler de tout son coeur sur la table de salle à manger, travailler que c'en était impressionnant.
Rien n'a changé en moi depuis ce temps-là. Je suis exactement la même. Je revis cet instant comme s'il était présent. Il a la même "densité" de présence que l'instant actuel.
Pourtant, le corps que j'habite n'est plus le même ; l'environnement de l'époque n'existe plus ; mon père a disparu également.
Jusqu'à l'âge de sept ans, il me semble avoir été dans un nuage, un nuage de bonheur hors temps. Ensuite les choses se sont durcies, au point qu'il m'a semblé impossible d'atteindre les 20 ans, l'âge rêvé d'une "libération" des liens dans lesquels je me sentais enfermée.
En fait l'ego, formé de multiples conditionnements, venait de se constituer et refermait sa chape de plomb autour de ma vision. Non seulement celle-ci était obscurcie, mais tous les efforts pour m'en libérer allaient rajouter encore à cette obscurité.
Contrairement à mes inquiétudes, j'ai eu 20 ans et, me libérant d'une forme de conditionnement, me suis jetée dans une autre forme de conditionnement : d'autres souffrances, d'autres blocages, et une recherche insatiable de libération... passant par des thérapies, des études livresques ou des voies spirituelles ne menant jamais nulle part, qu'à de vagues satisfactions temporaires.
Mais je me disais : "L'an 2000, c'est tellement loin ! Je ne vivrai pas au-delà, c'est certain."
L'an 2000 a été comme un virage à 90°, un coude dans ma destinée mais je l'ai tout de même traversé. Et sans changer d'un chouïa : j'étais toujours la même. Mais à force de chercher, chercher, j'avais trouvé dans les astres la certitude que je ne pouvais dépasser impunément mars 2017. Oh ! j'étais une bien piètre astrologue, mais tout de même, au regard de mon thème natal, la rencontre de Neptune en Poissons, Pluton en Capricorne, Uranus en Bélier, Saturne fin Sagittaire et Jupiter mi-Balance formait une coïncidence inouïe à laquelle il me semblait ne pas pouvoir survivre !
Mais c'est passé. Et comme disent tous les bons astrologues, personne ne peut prédire l'heure de la mort. De plus, lorsque mes proches ont disparu, jamais je n'ai pu en lire la raison dans les astres...
Ceci signe la défaite du mental. Il a tricoté une grosse pelote de complications à partir de mes sept ans qu'il s'est amusé à emmêler et emmêler de toutes ses forces jusqu'à ce jour, formant ce qu'on appelle un ego, un ego qui se regarde, cherche à se comprendre et à se libérer... mais de quoi ? Peut-on se libérer de soi-même ?
La mort vous enlève à vos problèmes, à votre idée de vous-même. La mort vous retire l'envie de chercher, l'envie de vous battre pour atteindre un but quel qu'il soit... et vous rend à ce que vous êtes simplement : ce regard ouvert, intensément ouvert.
Du moins la mort de l'ego, c'est-à-dire cette découverte que tout est du pipeau, que tout a toujours été du pipeau, et que rien n'a vraiment changé de l'essentiel : que ce regard ouvert sur la fenêtre lumineuse est toujours le même, exactement le même, et que cela seul est vrai...
Pour illustrer mon propos, voici une vidéo prise il y a quelques jours. Elle représente l'Esprit qui retourne à sa source de lumière, inévitablement aspiré par elle.
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Commentaires
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Mercredi 5 Avril 2017 à 15:15
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Coucou Aloysia, si le temps n'existe pas, l''espace non plus. J'attends d'être de l'autre côté pour m'en apercevoir vraiment !!! Je penserai >Polynésie et j'y serai immédiatement, je penserai Issoudun et je serai près de toi !!! C'est pas beau tout ça ! Bisous
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Mercredi 5 Avril 2017 à 18:22
Exactement, le temps et l'espace ne font qu'un et j'étais partie au départ pour parler de l'espace, quand ces idées se sont imposées et je n'ai pas voulu tout compliquer en mélangeant les sujets. Mais dis donc, j'aimerais bien que tu viennes à Issoudun au moins une fois en chair et en os, depuis le temps qu'on en parle !!
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4gazouMercredi 5 Avril 2017 à 16:33J'ai eu aussi cette certitude que je n'aurais jamais 20 ans ...
je me revois couchée tournée vers une copine de dortoir et lui en faisant la confidence
Passé cet âge je ne ma suis plus jamais fixé de limite ...
J'avance sans certitude heureuse d'être encore là chaque matin
Heureuse des portes ouvertes des obstacles franchis.
Belle soirée Aloysia
Bisous
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Mercredi 5 Avril 2017 à 18:26
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Ah! ce fameux ego !Comme je ressens ce que tu écris mais mon exigence semble moindre que la tienne. Même si tout n'est qu'illusion, il y a eu dans ma vie des moment illusoires tout à fait satisfaisants. Il est vrai que je suis un épicurien. J'ai aimé ton texte , plein de sincérité.
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Jeudi 6 Avril 2017 à 17:17
Merci Daniel. Il me semble que la sincérité est primordiale et je m'efforce, comme toi-même sais si bien le faire, de parler d'expérience plus qu'en utilisant citations et références. Cependant il est vrai que l'ego est parfois présenté comme un redoutable adversaire, dont le danger principal est de demeurer caché : car quand on l'a enfin cerné, ouf, on s'aperçoit qu'il a disparu...
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Ton article me plaît énormément... et cette évaporation est bien trouvée.
On avance, c'est une évidence... Le temps passe... Chaque jour qui passe nous éloigne de notre naissance et nous rapproche de notre mort... Le chemin est plus ou moins long... Ce qui est sûr c'est qu'il suffit de se replonger dans le passé pour y revivre des choses vécues... ou bien nous sentir dans un autre décor... plus de temps, plus d'espace... tout se confond...
Bises Aloysia et merci encore pour tes gentils commentaires.
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Samedi 8 Avril 2017 à 21:13
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Quel beau souvenir ! C'est magique de le lire. Je me suis tellement identifiée à ce que j'ai lu que c'était comme si cela m'était arrivée. Mes premiers souvenirs sont moins beaux.
Je me souviendrai de cette petite fille et de ce papa si protecteur.
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Mercredi 12 Avril 2017 à 09:25
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Parfois je me dis que l'enfant que j'étais avait tout compris et que les chemins de maturité ne sont là que pour nous tromper. La maturité est un leurre dont il faut se détacher pour retrouver son authenticité et surtout son regard "ouvert" sur le monde.
Je me souviens d'un rêve que j'avais fait vers les sept ans, il était très révélateur, il était une incitation à garder mon âme d'enfant... la seule condition du bonheur possible malgré toutes les raisons que j'allais avoir de maudire la vie et le monde, malgré même le sentiment de force que pouvaient apporter une autre attitude mentale. Non, je n'ai pas oublié ce rêve mais mon attitude, dans la vie, n'a pas souvent été comprise.
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Mercredi 12 Avril 2017 à 09:26
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Coucou,
je viens de lire tes billets en remontant le temps. Et je me pose ici. Curieuse coïncidence, ma soeur m'a envoyé des liens vers des vidéos de physiciens. Parfois un peu difficile à suivre tout ça, mais passionnant. Il paraît que le temps n'existe pas, que l'espace est plein de vide, comme tout ce qui nous entoure ainsi que nous mêmes.
je vais te les envoyer. Mais peut-être les connais-tu déjà? Tu me diras.
Remonter le temps par le souvenir.Il m'arrive pendant une fraction de seconde de revivre quelque chose si intensément que je ne suis plus là, dans le présent. C'est rapide mais extraordinaire. Ton billet, tes billets mériteraient que je discute longuement mais je dois filer ( la famille)
Merci et bonne fin de journée
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Dimanche 16 Avril 2017 à 22:17
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Dans la vie j'avance
Non sans oublier avant
Mais pour mieux faire autant que faire se peut
Je ne mets pas le doigt sur l'impossible
Que je ne saurais dévier
Dans l'absolu, je trace
Ma vie en me satisfaisant non de l'ennui
Mais de la chance d'être en vie
Pour avancer
Bise et bonne journée
Cela dit très intéressant ton billet
@ Bientôt
Merci pour ce poème, chère Rose.