• L'horizon resplendissant


       J'avais l'intention ce matin de citer un poème de Tagore ; et puis voici que celui-ci s'est interposé, comme s'il devait être mentionné avant ! Je remets donc Tagore à demain ou après-demain, pour commencer avec ces images de départ.

         En effet c'est ma dernière visite à Ariaga, dans son dernier article, qui m'a conduite à me remémorer ce cycle de poèmes de Jean de la Ville de Mirmont (né à Bordeaux en 1886 et mort à Verdun à l'âge de 28 ans) mis en musique par Gabriel Fauré (avec des coupures et quelques remaniements) : l'Horizon Chimérique.
     

             C'est évidemment à mes yeux une allégorie, mais accompagnée aujourd'hui d'une certitude : l'horizon n'est pas "chimérique", mais resplendissant ! Et si le petit Jean, dans la strophe délaissée par Fauré à la fin de ce poème (voir ici) s'inquiète de savoir si Les sauvages accepteront son coeur, je sais pour ma part, que Le Resplendissant l'a déjà accepté.

        J'ai cherché sur youtube un enregistrement de ce poème seul, qui est le second sur les quatre retenus par Fauré pour son cycle de mélodies (alors qu'il est le dernier sur XIV dans le manuscrit du jeune poète bordelais). Cependant ma préférence va à l'enregistrement de Charles Panzera (suivre le lien et démarrer à 1'18), qui est le dédicataire de l'oeuvre et qui l'interprétait sur le disque par lequel je l'ai découvert, en 1967.

     

     

    Je me suis embarqué sur un vaisseau qui danse
    Et roule bord sur bord et tangue et se balance.
    Mes pieds ont oublié la terre et ses chemins ;
    Les vagues souples m’ont appris d’autres cadences
    Plus belles que le rythme las des chants humains.

    À vivre parmi vous, hélas ! avais-je une âme ?
    Mes frères, j’ai souffert sur tous vos continents.
    Je ne veux que la mer, je ne veux que le vent
    Pour me bercer, comme un enfant, au creux des lames.

    Hors du port qui n’est plus qu’une image effacée,
    Les larmes du départ ne brûlent plus mes yeux.
    Je ne me souviens pas de mes derniers adieux...
    Ô ma peine, ma peine, où vous ai-je laissée?

     

     

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  • Commentaires

    1
    Mardi 31 Mars 2015 à 09:58

    Coucou Aloysia, s'il suffisait de s'embarquer sur un bateau pour oublier sa peine, il y aurait beaucoup d'amateurs de croisière. Regarder l'horizon et oublier, se laisser bercer par les vagues, une belle diversion ! Bonne journée et bises.

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    2
    Mardi 31 Mars 2015 à 12:10
    renee

    J'avoue que dès que j'ai entendu la chanson j'ai coupé le son, ce genre de musique n'étant pas du tout ma tasse de thé, pourtant ce poème lu seul est très beau......


    J'imagine aisément que sur l'océan on oublie un peu les bassesses qui sont faites sur la terre, contemplant les vagues et le ciel ces immensités ou le regard se perd. Bisesssss

    3
    Mardi 31 Mars 2015 à 14:05

    ->Danaé : Justement à cette époque, tous les jeunes se précipitaient sur la route des Indes et les poètes ne cessaient d'en parler : 

    - Baudelaire : "Homme libre, toujours tu chériras la mer !"
    - Mallarmé : "La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres ;
                                Fuir là-bas, fuir ! Je sens que les oiseaux sont ivres..."
    - Rimbaud : le Bateau Ivre.
    -Tristan Klingsor : "Je voudrais m'embarquer avec la goélette
                                           Qui se berce ce soir dans le port, mystérieuse et solitaire..."

    Et Albert Roussel (Padmavati, Evocations), Jacques Ibert (Escales), Maurice Ravel (Schérérazade), tous parlaient de l'Asie dans leur musique.
    Sans parler du Marius de Pagnol, qui s'embarque en abandonnant Fanny.

    Eh oui, c'est un symbole en fait, car la mer évoque l'immensité de l'Absolu. Tandis que la destination (Asie ou îles lointaines) est l'Eldorado du Paradis retrouvé.

    -> Renée : Je te comprends tout à fait ; cette musique non seulement demande une habitude d'écoute, mais surtout impose comme toute musique, que l'on soit en phase momentanément avec elle.  Merci cependant de ta visite et de ta compréhension ! 

    Bises à toutes les deux.

    4
    Mardi 31 Mars 2015 à 14:36
    Notre monde est bien sur un océan qui traverse une tempête... notre esquif est frêle... et le danger est souvent là...et notre pauvre auteur en a fait les frais dans sa jeunesse...
    5
    Mardi 31 Mars 2015 à 15:10

    Bonjour

    Un poème plein de tristesse!

    Ce sont souvent les plus beaux!

    Bisous

    6
    Mardi 31 Mars 2015 à 15:20

    -> Jean : l'esquif du monde ne nous semble fragile que pour nous pousser à nous y accrocher davantage ! Mais si nous nous embarquions sur la mer de l'Absolu plus rien ne nous menacerait. 

    -> Wolfe : je savais que tu apprécierais, car tu es vraiment poète ...  Bisous.

    7
    Mardi 31 Mars 2015 à 16:46

    J'aurais aimé lire à haute voix le poème en écoutant Gabriel Fauré. La voix m'a déconcentrée

    Bisous

    8
    Mardi 31 Mars 2015 à 18:23

    Ah, je comprends ; tu ne peux pas lire à haute voix pendant que quelqu'un chante... 

    Bisous !

    9
    Mercredi 1er Avril 2015 à 08:24

    Bonjour,

    Ici, les mots se noient dans les larmes.

    Là, ils ont peine d'exister parmi les hommes.

    Enfin, le silence convient à leur âme éplorée.

    Silencieuse sympathie, Jack

    10
    Mercredi 1er Avril 2015 à 09:25

    Merci, Jack, pour ces douces larmes qu'efface le Silence resplendissant.

    11
    Mercredi 1er Avril 2015 à 16:22
    Daniel

    Ce n'est pas mon genre de poèsie et pourtant j'ai aimé ce poème mélancolique.

    12
    Mercredi 1er Avril 2015 à 19:34

    J'aime beaucoup l'interprétation qu'en a faite Fauré, mais surtout, j'utilise ce poème ici à double sens. Il s'agit d'un voyage intérieur.



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