• De quelles Amériques


            Depuis quelque temps me revient en tête cette chanson.

          La première fois que je l'ai entendue, j'avais quelque 22 ans et faisais un stage de théâtre près d'Avignon, à Pâques.

          On nous faisait tourner les bras comme des hélices sur la musique pour mieux respirer, et en effet dès que retentissaient les premières notes nous nous sentions "gonflés" comme au sens propre du mot grec : "enthousiasme" : 

            " Inspiration ou possession par le divin "

     

     

     

    De quelles Amériques
    En passant par quel Atlantique
    En me tombant de quelle nue
    Ce soir m'es-tu revenue ?

    Ne m'en dis rien, ne parle pas,
    Depuis le temps j'ai tant changé
    Que je ne te reconnais pas.

    Nous sommes là main dans la main
    Comme si nous n'avions pas d'âge,
    Tu ne reviens d'aucun voyage
    Nous parlerons demain...

    Regarde la rue, les enfants qui courent
    Tu es revenue, les feuilles s'envolent
    Là-bas dans la cour de la petite école.

    Pour quelle histoire ancienne
    Avais-je perdu ta mémoire
    Et pour avoir eu quelle peine
    Es-tu revenue ce soir ?

    Ne m'en dis rien, ne parle pas
    Tu reviens de loin sur tes pas ;
    Si ton soleil était là-bas,

    Ton ombre était restée ici
    Faisant son nid dans le silence,
    Tu étais là en ton absence
    Et je vivais ainsi !

    Regarde la rue, les arbres qui bougent,
    Ce chaperon rouge qui a rendez-vous
    Entre chien et loup. Oh ! tu es revenue !

    A l'horloge arrêtée, quelle heure est-il ?
    Je ne sais pas,
    L'heure n'a plus jamais été,
    Ne me demande surtout pas

    Par quel passé je suis passé
    Quand je pensais à autrefois
    Au temps où tu étais à moi :

    J'aurais voulu être à ma place.
    Oh ! écoute le vent qui passe,
    Je ne t'ai pas dit que je t'aime
    Je t'aime tant, je t'aime...


    Jean-Loup Dabadie (texte) - Jacques Datin (musique)

     

          À l'origine bien sûr ce texte évoque les retrouvailles d'amants qui veulent tracer un trait sur leurs errements et infidélités.

            Mais ne ressent-on pas simultanément une impression de retrouvailles intérieures, comme s'il s'agissait d'une partie de soi qui s'était égarée aux antipodes et qu'enfin l'on réussissait à réintégrer à soi ? Surtout lorsqu'on est une femme et que la personne retrouvée est au féminin... !

            Et dans ce cas, ne faut-il pas réellement tourner les bras comme des hélices pour couvrir en pensée l'immensité de ces distances, réelles ou imaginaires, mises entre soi et soi - entre ce qui est passé on ne sait comment ("l'heure n'a plus jamais été") et l'endroit où l'on s'est perdu on ne sait comment non plus ("dans quelles Amériques") ? 

         Qui est perdu, dans cette béance où l'ombre est cependant toujours présente ; et qui aime qui, sinon soi-même ?

          Mais tandis que le vent passe, j'aimerais, oui, être à ma place... 

     

     

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  • Commentaires

    1
    Mardi 27 Janvier 2015 à 09:58

    oui oui, j'adorais cet artiste à part entière ,

     

     L'écrire n'est pas pour te faire plaisir en guise de commentaire laissé comme cela ...

    Oui je le pense 

    c'était un poète, un interprète remarquable, ils se font rares de nos jours mais l'espoir fait vivre et il nous reste leurs  oeuvres, leurs  textes 

    Emoticone et smiley dit bravo à toi pour ce billet que j'ai apprécié 

    2
    Mardi 27 Janvier 2015 à 09:59

    Commentaires d'origine :

    Rose63
    Il y a 1 mois 

    Une très très belle chanson
    Chacun est à la place qu'il veut bien se donner 
    Il ne faut pas trop jouer et peser les mots 
    La vie mérite mieux que cela 
    Belle journée à toi 
    Je vais dessiner le soleil
    Pour le faire sortir :)

    Aloysia-Martine 
    Il y a 1 mois 

    Merci, Rose ! En effet le soleil est sorti chez nous, après un début de matinée bien triste; mais maintenant des nuages couvrent le ciel. N'importe ! Il est bien à sa place, ce soleil, et il y reste lui, au moins . 

    Daniel
    Il y a 1 mois 

    Savoir rester sa place. Savoir trouver sa vraie place. Ne pas trop en faire et ne pas se minimiser non plus. Tout un art !

    jill bill
    Il y a 1 mois 

    Bonsoir Martine, je découvre ce Serge très beau un peu façon la Mathilde de Brel.... ;-) Merci, jill

    Aloysia-Martine
    Il y a 1 mois 

    Oui, Serge est grandiose dans cette chanson. Bises, Jill !

    Tout un art, comme tu dis, Daniel...

    Ariaga
    Il y a 1 mois 

    C'est vrai qu'il y a des moments où on a l'impression de se perdre et une musique, des paroles, peuvent être un déclic qui nous ramènent vers le centre, là où nous habitons. Amitiés.

    Aloysia-Martine
    Il y a 1 mois 

    Amitiés, Ariaga. J'ai pensé à toi ce midi, en regardant Jacqueline Kelen répondre aux questions d'Elise Lucet vers 13h45 sur la portée initiatique des contes de fées. C'était passionnant.

    Martine
    Il y a 1 mois 

    Bonjour Martine,

    Il est vrai que cela peut-être interprété de plus d'une façon. Belle chanson au demeurant
    j'ai particulièrement aimé cette strophe
    "Ton ombre était restée ici
    Faisant son nid dans le silence,
    Tu étais là en ton absence
    Et je vivais ainsi !"

    Merci Martine
    passe une douce journée ( ici pluie et vent. c’est pas top)

    Martine

    Aloysia-Martine
    Il y a 1 mois 

    Bonjour Martine ! Oui pour la pluie et le vent, nous avons pris un abonnement longue durée semble-t-il. Merci d'avoir apprécié cette chanson, et cette strophe qui me plaît également énormément.

    Carole
    Il y a 1 mois 

    Je ne connaissais pas cette chanson. Merci, elle est très belle en effet. J'aime bien la formule finale. Etre à notre place, nous le voudrions tous...

    Aloysia-Martine
    Il y a 1 mois 

    En fait je déforme le sens prévu... L'auteur de la chanson évoque le temps où les deux amoureux vivaient leur lune de miel et confie comme il rêvait de revivre ces moments lorsqu'il était seul.

    Mais moi qui transpose en imaginant des retrouvailles intérieures j'évoque "ma vraie place", ce qui n'est qu'une interprétation. 

    Oui, je suis surprise que cette chanson soit si absente sur youtube - ou alors interprétée par d'autres de façon épouvantable - alors que c'est l'une des plus belles qu'ait chanté Reggiani.



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