Et si mourir, c'était simplement quitter son corps et le déposer comme un vêtement lorsqu'on est fatigué ? Et si en se balançant, le vertige aidant, on pouvait soudain se retrouver... au-dessus de son corps ?
C'est une question que je me suis posée il y a quelque temps et qui a motivé ce poème, que j'avais publié au début de ce blog mais qui n'avait pas été lu.
Au jeu des balançoires Il a perdu son âme… Ou n’est-ce pas auparavant, Tandis qu’enfouie au fond de lui Il la tenait captive, Muette et oubliée, Qu’il en était privé ? Et voici qu’à force de rire À gorge déployée Sur un morceau de bois agité dans les airs, Atterrissant et décollant sans cesse En un piqué-levé, En une chute-élévation, Allant, venant, Poussé, chassé, Il ne fut plus qu’un ample mouvement, Que vitesse envolée, Que va-et-vient charmé, Qu’emportement ravi…
Et soudain,
Son âme s’échappa comme l’eau s’évapore
Et s’immobilisa à le regarder vivre,
Ailes déployées,
Superbe comme un lys
Dressé dans le soleil couchant…
Défaillant, à sa corde agrippé,
Il vit le soir doré
Superbement s’épandre,
Et il sentit les arbres exhaler leur odeur,
Tandis que peu à peu
Leurs effluves le pénétraient…
Et le rayonnement secret du soir,
Comme une nourriture exquise
Entra dans sa respiration,
Y demeura comme en suspens,
S’y déploya…
En un instant,
Il se sentit égal au paysage,
Rire égrené sur fraîcheur répandue,
Et chute suspendue ;
Alors son corps fut si sensible
Qu’il le posa sur le gazon.
J'avais écrit ce poème pour la mort de mon grand-père. Aujourd'hui juste après l'avoir publié, j'apprends que mon amie Martine vient de perdre son père. Étonnante coïncidence ! Je le lui offre donc.